Depuis la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001, l’article 1751 alinéa 3 prévoit qu’en cas de décès d’un des époux, le conjoint survivant cotitulaire du bail d’habitation dispose d’un droit exclusif sur celui-ci. Sous l’ancienne réglementation, le conjoint survivant était moins protégé et se trouvait en concurrence avec les héritiers du défunt en application de l’article 14 de la loi de 1989. Un arrêt de la troisième chambre civile du 25 novembre 2009 illustre bien cette concurrence entre les héritiers.
L’arrêt du 3 juin 2018 permet à la troisième chambre de la cour de cassation de mettre en application les nouvelles dispositions. Dans cette affaire, un époux avait pris à bail un logement HLM qu’il avait occupé avec son épouse et leurs enfants. Le preneur est décédé suivi de son épouse quelques années plus tard. Leur fille avait sollicité le transfert du bail à son profit auprès de l’organisme de HLM. Le bailleur avait refusé ce transfert au motif qu’elle ne remplissait pas la condition d’adaptation du logement à la taille du ménage. La requérante soulevait qu’elle ne lui était pas applicable en raison du transfert du bail d’habitation par voie successorale au jour du décès de son père.
La Cour de cassation rejette cet argument au motif que l’article 1751 du code civil accorde au conjoint survivant un droit exclusif sur le logement qui servait effectivement à l’habitation des époux avant le décès, sauf renonciation de sa part. L’article 1751 du code civil prive ainsi les héritiers qui vivent dans les lieux au moment du décès du preneur de tout droit locatif en présence du conjoint survivant et à la condition que cet époux n’ait pas renoncé à son droit.
Un arrêt de la cour de cassation du 18 mai 2011 a rappelé que la renonciation à son droit exclusif sur le bail devait intervenir postérieurement au décès d’un époux, sans quoi elle n’est pas valable. La fille du locataire pouvait prétendre au bénéfice du transfert au bail qu’au jour du décès de sa mère. C’est donc à ce jour qu’il fallait apprécier si elle remplissait les conditions pour cela.
Pour bénéficier de l’application de l’article 1751 du code civil, il est nécessaire que le local soit utilisé effectivement au logement de la famille. A défaut, le conjoint survivant ne peut pas s’en prévaloir. Dans une telle hypothèse, le conjoint survivant devra solliciter l’application d’un autre texte pour bénéficier du bail d’habitation à savoir l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989. Il n’en bénéficiera pas d’office et sera en concurrence avec les héritiers du défunt et notamment les enfants. Il est à noter que le texte prévoit qu’en cas de demandes multiples à bénéficier du bail d’habitation, le juge devra rechercher les intérêts en présence pour se prononcer.